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Voilà pourquoi je suis anti-faschiste
Struthof-Natzweiler
Avec ma classe, je suis allée au Struthof-Natzweiler sur une colline, versant alsacien. Je peux dire que non, les nazis, n'étaient pas des humains. Jamais. Le Struthof-Natzweiler était un camp de concentration des plus durs d'Europe, il y avait 40% de mortalité. A partir de sa date d'ouverture en 1939, les détenus étaient environ au nombre de mille, et en 1941, les rafles étant plus importantes, on en dénombrait 5 mille. Lors de l'évacuation en 1944, beaucoup moururent, les malades et les plus faibles ont été fusillés, et les autres sont partit en courant. Les chiens mordaient leurs mollets et les sadiques SS donnaient des coups de cravache à ceux qui n'allaient pas assez vite. La neige provoquait des engelures à leurs pieds nus...
Je ne savais pas que je pouvais être remplie d'autant d'horreur à la simple vue d'un vieux mur abîmé... J'avais l'impression en frôlant les bâtiments et en marchant dans les traces de toutes ces victimes, de voir leurs ombres hantant encore ce lieu maudit... Des ombres décharnées, cadavériques...
J'ai étouffée mes sanglots tout au long de la visite, me concentrant sur mon questionnaire pour ne pas m'évanouir... Ils n'étaient pas humains...
Nous sommes passés à côté de la villa du commandant et de sa femme. C'était une jolie maison avec une piscine, elle appartennait à un riche Luxembourgeois qui aimait passer ses vacances à Natzweiler qui était à l'origine un hameau tranquille entouré d'une belle forêt. Il s'est opposé à la vente de sa maison secondaire, les Allemands l'ont alors exproprié.
Un peu plus loin, j'ai eus une vue panoramique du camp en contre bas, il n'y avait plus les baraquements à cause des incendies provoqués par des néo-nazis qui comptaient effacer les crimes d'Hitler. Il ne restait plus que le crématoire au fond à côté de la prison encore en état. La carrière de grès rose s'étendait au loin, elle constituait le plus dur des travaux du camp. Les barbelés étaient rouillés mais j'avais le sentiment que cette couleur sombre qui les maculaient entièrement n'étaient pas de la rouille mais du désespoir et de l'effroi. Je suis passée sous la grande double-porte autrefois électrifiée, je me sentais minuscule et impuissante. Notre professeur d'Histoire nous expliqua qu'avant, il existait d'autres baraquements à côté de la porte qui servait à entasser les seuls biens que possèdaient encore les déportés après la gare de Rögen. J'imaginais quelques enfants qui arrivés ici, morts dans le train ou fusillés dès l'arrivée, et dont on prennaient les mignonnes petites chaussures et dont on coupaient les jolies boucles...
Nous pénétrions ensuite dans le musée, j'ai vu quelques photographies de ces héros de la Résistance, de ces victimes encore debouts dont la mort avait déjà pris l'âme, de ces visages creusés et livides, de ces yeux vidés et aussi froids que la mort... Des maquettes avaient été faites, très réelle mais tellement désolante, je pensais à ces gens qui les avaient fabriquées avec tant de détails, comme pouvaient-ils faire ça avec autant d'application?...
J'ai lus de-ci de-là ce que faisait subir les SS et les Kapos aux détenus. Les chiens mordant les mollets, les jeux sadiques, la violence gratuite, les punitions, les châtiments mortels... Je me souviens d'un, les SS avaient mouillé un détenu coupable d'avoir volé une ration de pain, et ils l'avaient obligé à rester dehors au vent froid... Il pouvait soit rester en vie pour un temps avec une pneumonie ou alors il mourait... Un autre était pas mal non plus en dégrès de cruauté, les SS mettaient un détenu debout devant les fils barbelés électrifiés, il crevait de faim, de soif et de fatigue mais s'il s'effondrait sous le poids de tout ces besoins cumulés, il s'électrocutait sur les barbelés...
J'ai vu les couches dans lesquelles ils dormaient entassés à trois dans un même "lit" recouvert d'une couverture sale et infestée de puces et de poux. Je me disais que moi-même j'avais dû mal à dormir dans le même lit avec mes petits frères alors avec des personnes étrangères qui m'écrasais...
Je suis entrée à contre-coeur dans une petite salle où l'on affichait trois visages de personnes sur lesquelles ont avaient fait des expériences, je n'ai même pas osé lire ce qu'il leur avait été fait. A ce moment là, je me suis sentie mal, je n'arrivais à m'imaginer un humain pouvoir faire ça. Blanche, je suis sortie de la pièce pour rejoindre le groupe.
Nous allions voir la prison. Je trouvais ça totalement absurde, quel pouvait être l'intérêt de mettre une prison dans une prison?... La baraque avait d'abord été construite pour que les SS aient des chambres et du chauffage mais comme des révoltes auraient pû se présenter, les SS ont été dormir à l'extérieur du camp par sécurité. Le baraquement a donc été une prison.
Un chevalet de bastonnade était exposé, le professeur a expliqué qu'on allongeait dessus un détenu sanctionné, il était à plat ventre, les mains et les chevilles prises en étau dans de lourds fers et sanglées, ainsi le détenu ne pouvait pas se débattre. Les sadiques mettaient le malheureux sur la place d'appel et le fouettaient ou le cravachaient au niveau des reins, un endroit très sensible. Le professeur voyant mes yeux larmoyants a un peu adoucit le ton et me regardait avec un regard compréhensif et désolé.
Ensuite j'ai vu les cellules qui s'avéraient être à l'origine des chambres, elles faisaient 5 m sur 5 et étaient très mal isolées. Ce qui devait servir de chauffage étaient devenus des cachots où l'on tenait à trois, mais sans repos, pas assez de place pour s'assoir et pas assez haut pour rester debout... Fléchis et courbé pendant trois jours, avec une petite ration de pain et d'eau, à peine de quoi survivre.
Nous avons été au crématoire. Il y avait une grande cave interdite à la visite où on entassaient les corps, et que l'on remontait à l'étage à l'aide d'une poulie. On aurait dit un four à pain sauf que là, on mettait au maximum trois cadavres et on les enfournaient... J'ai entendu une anecdocte affreuse, une femme que l'on a cru morte s'est retrouvée sur la plaque de métal, elle s'est réveillée au moment où le SS l'enfournait, elle lui a arraché la moitié du visage pour tenter (en vain) de s'extirper.
Derrière le four, il y avait trois crochets, où l'on exécutaient les Résistants. Parfois l'on mettait quelques planches sous leurs pieds pour faire durer la mort, ils succombaient par strangulation.
Nous sommes passés devant la salle d'autopsie, je n'ai même pas osé regarder, trop perturbée... Le professeur m'a presque tirée dehors pour que je prennes l'air et nous avons fait une minute de silence sur le mémorial. J'ai serrée la main de ma meilleure amie en me disant que toutes les deux, jeunes militantes du Front de Gauche, ont allaient faire tout pour empêcher que ça recommence.
Les fleurs déposées au centre me semblais si belles, c'était comme des taches colorées dans ce sombre tableau en noir et blanc emprunt de souffrance et de terreur.
Nous sommes ensuite retournés au bus pour descendre et aller à la chambre à gaz. Je me suis sentie vraiment étrange en franchissant le seuil. Les murs me paraissaient avoir souffert de griffures désespérées de toutes ces victimes... Le commandant assistait avec enthousiasme aux gazifications, il regardait par un trou conçu spécialement pour observer les victimes qui s'axphysiaient. C'était une salle d'environ 2 m sur 2, où on pouvait pousser 60 personnes d'un coup.
Le kommando morgue, s'occupait de jetter les cadavres dans des cuves en béton et en carrelage blanc. J'ai regardée ces cuves blanches abîmées, du sang maculait encore l'une des trois. J'ai blanchis à deux doigts de l'évanouissement. J'imaginais un homme squelletique lançer le cadavre d'un homme avec qui il avait dormit dans les baraquements. J'avais l'impression d'entendre le bruit sourd des corps qui tombaient un par un dans les cuves, ces bruits écoeurants... J'imaginais leurs fantômes emprisonnés à l'intérieur, frappant inlassablement les carreaux blancs, avec cette peur indélébile, cette peur de mourir mais seul problème, là ils étaient morts... Je me suis appuyée au mur, blanche, et la tête me tournant, je me suis accrochée à un pion du collège venu à l'occasion avec qui je m'entends. Il m'a aidé à sortir dehors me conseillant de respirer calmement et d'aller me rassoir dans le bus. Je tremblais et mes jambes n'étaient plus que du coton... Ils n'étaient pas humains... En fait, après mûres réflexions, justement si, ils étaient humains...
Voilà pourquoi, camarades, je me bats et me battrais toujours contre les fachistes, les racistes, les machistes et tout ceux qui s'y rattachent. Je ne veux pas que l'Histoire bégaye et qu'un cauchemar recommence...
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